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CONTRIBUTION

Paris se prépare à tourner la page Biya au Cameroun

Serge Lavoisier
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Paul Biya au palais présidentiel de Yaoundé, le 26 juillet 2022. © Ludovic MARIN _ AFP
Paul Biya au palais présidentiel de Yaoundé, le 26 juillet 2022. © Ludovic MARIN _ AFP
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Le 4 octobre 2025, la section française du Front national pour le salut du Cameroun (FNSC) a organisé en France une conférence de soutien à la candidature d’Issa Tchiroma Bakary, en vue de l’élection présidentielle camerounaise prévue pour le 12 octobre. Présentée comme une initiative de la diaspora, cette rencontre a toutefois soulevé de nombreuses interrogations sur l’implication réelle de Paris, tant les signaux d’un réalignement diplomatique français se multiplient.

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Selon plusieurs observateurs, la France semble s’éloigner du président Paul Biya, au pouvoir depuis plus de quatre décennies. Paris ne miserait plus exclusivement sur le chef d’État sortant, mais chercherait à préparer l’après-Biya, en tissant des liens avec des figures de l’opposition.
Dans cette logique, Issa Tchiroma Bakary apparaît comme un candidat de compromis : opposant déclaré au régime, il demeure néanmoins favorable à la préservation des intérêts français au Cameroun, notamment dans les domaines économique et sécuritaire.

Issa Tchiroma se distingue par une position modérée : hostile à l’abandon du franc CFA, il soutient une coopération étroite avec la France dans la lutte contre le terrorisme.
Les sondages le désignent comme l’un des adversaires les plus crédibles de Paul Biya, certains évoquant la possibilité d’un scénario similaire à celui du Sénégal en 2024, où l’opposition avait remporté une victoire surprise. Mais, contrairement au renouveau sénégalais, une victoire de Tchiroma ne signifierait pas de rupture radicale. Bien au contraire, elle pourrait assurer la continuité de l’influence française au Cameroun.

En juin 2025, Issa Tchiroma aurait rencontré en secret l’ambassadeur de France à Yaoundé, peu après un discours virulent contre le régime Biya. Une telle entrevue, dans un contexte électoral tendu, interroge sur les véritables intentions de Paris.

Récemment, le 9 octobre, l’ambassadeur français a rencontré Maurice Kamto, autre figure majeure de l’opposition, bien que ce dernier soit écarté de la course. Cette rencontre a ravivé les soupçons d’un soutien français croissant à l’opposition, au détriment du camp présidentiel.

Si Issa Tchiroma est perçu par certains comme un « pion de la France », Paris se garde bien d’afficher un soutien trop visible. Une implication ouverte pourrait heurter la jeunesse camerounaise, dont près de 40 % des électeurs rejettent toute ingérence postcoloniale.
Cette stratégie de discrétion s’inscrit dans la logique de la « soft power » française : influencer sans s’exposer, façonner la transition sans apparaître comme le maître d’œuvre.

Ainsi, à l’approche du scrutin, la présidentielle camerounaise prend des airs de théâtre géopolitique, où la France, en quête d’un successeur docile à Paul Biya, joue en coulisses un rôle déterminant. Pour de nombreux observateurs, ces élections s’annoncent moins comme un exercice de souveraineté que comme un nouveau « spectacle français » sur la scène politique camerounaise.

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