Wilfried Léandre Houngbédji est né le 25 mars 1977 au Bénin. Après ses études secondaires à Cotonou, il poursuit un cursus supérieur à l’Université d’Abomey-Calavi où il se forme notamment aux sciences de l’information et de la communication. Très tôt, il se passionne pour le journalisme et l’écriture, nourri par l’ère d’ouverture démocratique qu’a connue le Bénin dans les années 1990. Cette période d’essor de la liberté de la presse influence le jeune Houngbédji dans sa vocation : il ambitionne d’informer et d’analyser de manière engagée la vie publique de son pays.
Houngbédji entame sa carrière de journaliste au quotidien d’État La Nation, où il s’affirme comme un observateur attentif de la scène sociopolitique béninoise. Reconnu pour sa plume incisive, il fait partie des jeunes auteurs béninois les plus lus de sa génération. En mai 2008, il publie son premier essai Liberté et devoir de vérité, une autobiographie intellectuelle dans laquelle il retrace son parcours et explicite ses engagements personnels.
La même année, en décembre 2008, il fait sensation avec Scandales sous Yayi, un livre au ton très critique à l’égard du président d’alors, Thomas Boni Yayi. Dans cet ouvrage, Houngbédji dénonce avec virulence la gouvernance du régime dit du « changement », en exposant une série de scandales politico-financiers (affaire des GSM, crise de la filière coton, malversations à la Société béninoise d’énergie électrique, etc.). Le livre rencontre un succès populaire immédiat – épuisé en librairie dès les premiers jours – y compris au sein de l’appareil d’État, où certains fonctionnaires le lisaient presque en cachette du fait de son contenu explosif. Ce franc-parler vaudra au journaliste des inimitiés. Selon ses dires, ses chroniques virulentes contre le pouvoir en place lui valent d’être mis au placard au journal La Nation peu après.
En décembre 2009, Houngbédji publie un troisième essai intitulé 2011…?! Chroniques d’une élection annoncée fatidique. Cet ouvrage compile 21 de ses tribunes analysant le climat pré-électoral au Bénin, à l’aube de la présidentielle de 2011. Lors du lancement du livre, le vétéran de la presse Jérôme Carlos salue « une photographie […] d’une situation politique dans un pays en stage de démocratie », et évoque la pertinence du regard que porte l’auteur sur l’évolution démocratique du Bénin. Houngbédji y réaffirme par ailleurs son indépendance d’esprit, déclarant n’être militant d’aucun parti si ce n’est celui du Bénin lui-même. Cette profession de foi traduit une idéologie patriotique et non partisane : « Je n’ai pas l’esprit partisan mais j’ai un parti politique, c’est le Bénin », affirme-t-il alors.
Entrée au service du gouvernement
Après l’alternance politique de 2016 qui porte Patrice Talon à la magistrature suprême, Wilfried Léandre Houngbédji opère une transition vers la communication institutionnelle. Dès l’élection de Talon, il est appelé à la Présidence de la République en tant que Directeur de la communication de la présidence béninoise, parrainé par le ministre d’Etat Pascal Irénée Koupaki. Dans cette fonction, il devient l’un des artisans de la stratégie de communication du nouveau pouvoir, mettant à profit sa connaissance du paysage médiatique et son expérience de journaliste politique.
Pendant cinq ans, il travaille dans l’ombre du chef de l’État pour affiner la communication gouvernementale et expliquer les réformes de la « Rupture » (nom donné au programme de gouvernance de Patrice Talon). Fort de cette expérience, Léandre Houngbédji est promu le 25 mai 2021 Secrétaire Général Adjoint du gouvernement et Porte-parole du gouvernement, succédant à ce poste à l’avocat Alain Orounla. Sa nomination coïncide avec la suppression du ministère de la Communication, dont le porte-parolat était précédemment rattaché – un signe de confiance du président Talon envers ce professionnel des médias.
Dès sa prise de fonction, Houngbédji s’illustre par un style de communication directe et pédagogique. Il tient régulièrement des conférences de presse et intervient sur les antennes de radios et télévisions pour commenter l’actualité gouvernementale. Parmi ses faits d’armes figurent la mise au clair de certaines rumeurs et polémiques dont notamment le limogeage de Mme Claudine Prudencio de la tête de l’Institut national de la femme, démentant les spéculations infondées à ce sujet. De même, il a exposé la démarche du gouvernement dans la répression du tapage nocturne, ou encore détaillé l’actualisation de la législation sur les jeux de hasard et paris, montrant sa maîtrise de dossiers très variés. Ce rôle transversal requiert de la part du porte-parole une capacité à vulgariser les décisions officielles et à répondre aux préoccupations de l’opinion publique, un défi qu’il relève avec l’assurance acquise au fil de sa double carrière de journaliste et de communicant.
Engagement politique et rôle de porte-parole
Bien que n’ayant jamais affiché d’affiliation partisane traditionnelle, Houngbédji s’est imposé comme une voix politique à part entière par ses prises de position publiques. Son engagement se traduit d’abord par une éthique journalistique axée sur la vérité et la justice sociale – en témoigne son combat contre la corruption sous Boni Yayi dans Scandales sous Yayi. Devenu porte-parole du gouvernement Talon, il inscrit son action dans la continuité de ces valeurs tout en défendant le bilan et la vision du régime en place.
Léandre Houngbédji se décrit volontiers comme un serviteur de l’État au-dessus des querelles partisanes, guidé par l’intérêt national. Cette posture se reflète dans ses déclarations où il soutient que sous la présidence Talon, « l’impunité est en recul » et que la lutte contre la corruption porte ses fruits, avec un assainissement des finances publiques et une quasi-éradication de la petite corruption en quelques années.
En tant que porte-parole, il est le visage du gouvernement face aux médias, chargé d’expliquer et de justifier les politiques publiques. À ce titre, il a défendu des mesures parfois controversées, notamment lors de l’élection présidentielle de 2021 marquée par des tensions pré et post-électorales. Dans des interviews accordées à la presse internationale, il a fermement soutenu la position du pouvoir en place. Par exemple, lors d’un entretien à Le Point Afrique en avril 2021, il a minimisé l’ampleur des troubles pré-électoraux, attribuant les violences à « des badauds [et] chasseurs traditionnels venus de pays voisins à l’instigation de politiciens en exil » plutôt qu’à des manifestants pacifiques, et salué l’action de l’armée qui a rétabli l’ordre.
De même, face aux critiques d’un supposé recul démocratique sous Talon, Houngbédji renvoie la balle aux opposants en exil, estimant qu’ils cherchent « par la rue ce qu’ils n’ont pas obtenu dans les urnes ». Ces éléments montrent un porte-parole combatif, aligné sur l’idéologie réformatrice du président tout en se défendant de toute allégeance partisane autre que le service du pays.
Sur le plan idéologique, Wilfried Léandre Houngbédji se définit comme un progressiste pragmatique. Il soutient les réformes économiques libérales menées par Patrice Talon, qu’il présente comme nécessaires pour le développement du Bénin, tout en restant attaché aux principes d’État de droit. Il insiste fréquemment sur le respect des institutions républicaines. Lors de débats autour d’une éventuelle tentation de troisième mandat présidentiel, il a publiquement réaffirmé que Patrice Talon quittera le pouvoir en 2026 à l’issue de son second mandat, conformément à la Constitution en vigueur. « Le président Talon partira en 2026. Il l’a dit, et il le fera », a-t-il martelé en 2025 pour dissiper les doutes de l’opposition sur ce point.
Publications et prises de parole publiques
En parallèle de ses fonctions, Houngbédji a enrichi le débat public béninois par ses ouvrages et interventions médiatiques. Voici ses principales publications :
- Liberté et devoir de vérité (mai 2008) – Essai autobiographique où il raconte son parcours personnel et exprime sa conception du journalisme engagé.
- Scandales sous Yayi (décembre 2008) – Enquête critique sur les scandales politico-financiers sous le président Boni Yayi, qui a fait grand bruit par son ton accusateur et son succès en librairie.
- 2011… ?! Chroniques d’une élection annoncée fatidique (décembre 2009) – Recueil de chroniques analysant les enjeux de l’élection présidentielle de 2011, dans lequel l’auteur clame son impartialité et son attachement aux valeurs démocratiques.
- Ainsi parle Patrice Talon (2016-2021) (octobre 2021) – Recueil de phrases et citations marquantes du président Patrice Talon durant son premier quinquennat, compilées par Houngbédji dans une perspective pédagogique et mémorielle.
En outre, Houngbédji s’est illustré à travers de nombreuses prises de parole dans les médias. Avant 2016, ses tribunes dans La Nation et sur son blog personnel alimentaient le débat citoyen par une plume à la fois analytique et critique. Depuis son entrée au gouvernement, il intervient régulièrement sur les plateaux de télévision nationaux, anime des points de presse gouvernementaux et accorde des interviews à des médias internationaux. Sa parole, mesurée mais déterminée, fait désormais partie intégrante de la communication politique du régime béninois.
Controverses et critiques
Figure publique exposée, Wilfried Léandre Houngbédji a été au cœur de plusieurs controverses tout au long de son parcours. Sous la présidence de Boni Yayi, son franc-parler lui a attiré les foudres du pouvoir. Ses révélations dans Scandales sous Yayi l’ont placé dans le collimateur du régime, conduisant à son éviction officieuse du quotidien La Nation où il travaillait. À l’époque, certains partisans du gouvernement Yayi ont dénoncé un réquisitoire à charge et mis en doute l’objectivité du jeune journaliste, qualifiant même son ouvrage de « scandaleux » dans la presse pro-gouvernementale de l’époque. Léandre Houngbédji a assumé ces critiques en revendiquant son devoir de vérité, fût-il dérangeant pour les autorités en place.
Depuis qu’il est porte-parole du gouvernement Talon, Houngbédji doit faire face aux critiques de l’opposition et de défenseurs des droits démocratiques, qui l’accusent de justifier les dérives autoritaires prêtées au régime. En effet, le second mandat de Patrice Talon a été émaillé de tensions politiques avec plusieurs figures de l’opposition (comme Reckya Madougou ou Joël Aïvo) qui ont été emprisonnées ou forcées à l’exil, et les élections de 2021 ont été boycottées par l’opposition. Dans ce contexte, les prises de parole de Houngbédji pour défendre la légalité du processus électoral et l’indépendance de la justice ont été perçues de façon mitigée.
Ses détracteurs estiment qu’il couvre des atteintes aux libertés politiques sous couvert de lutte contre l’impunité. Par exemple, en mars 2023, il a fermement répondu aux accusations de « démocratie en péril » lancées depuis sa prison par l’opposante Reckya Madougou. Tout en récusant ses critiques, il a rappelé que Madougou et Aïvo ont été condamnés pour des faits graves (financement du terrorisme et complot contre l’État) et que « celui qui appelle la pluie ne peut refuser d’être mouillé », insinuant que ces opposants paient le prix de leurs actes. Ce genre de déclaration, alignée sur la ligne dure du gouvernement, lui vaut d’être ciblé par les discours d’opposition. Certains responsables, tel l’ex-ministre Candide Azannaï, mettent en doute la sincérité des assurances données par Houngbédji – notamment sur la question du respect de la limitation des mandats présidentiels – en rappelant les promesses passées non tenues du pouvoir.
Sur les réseaux sociaux et dans les forums d’actualités, on trouve également des commentaires acerbes à son encontre, l’accusant d’être « complice » des actes du gouvernement dit de la Rupture ou de ne faire que du « bavardage » sans convaincre les sceptiques. Néanmoins, Houngbédji conserve aussi de nombreux soutiens, qui saluent au contraire son professionnalisme et sa maîtrise des dossiers. Lors de sa nomination comme porte-parole, beaucoup y ont vu « la prime à la compétence et à l’engagement », et considèrent que sa promotion récompensait des années de rigueur et de loyauté dans le service public.