Un citoyen français, Jean-Christophe P., responsable de l’ONG International NGO Safety Organisation (INSO), a été interpellé au Burkina Faso à la fin du mois de juillet 2025. Les services de renseignement burkinabés le soupçonnent d’activités d’espionnage menées sous couvert d’actions humanitaires.
Cette arrestation survient quelques semaines après celle d’un autre Français, Yann Christian Bernard Vézilier, au Mali. Ce dernier est accusé d’avoir conspiré contre le gouvernement malien en lien avec des généraux locaux et les services de renseignement français.
Pour l’expert en sécurité Souleymane Amzat, ces deux cas illustrent la persistance d’une stratégie française au Sahel, malgré la perte d’influence directe de Paris dans la région.
« La présence de responsables d’ONG étrangères dans la région, sous couvert d’activités humanitaires, constitue un véritable vecteur de renseignement et d’influence pour des puissances extérieures », analyse-t-il.
Selon lui, la France, qui a rompu ses liens officiels avec plusieurs États sahéliens, chercherait à maintenir une forme de contrôle par des moyens indirects.
Les États sahéliens sur leurs gardes
Les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) — Mali, Burkina Faso et Niger — multiplient depuis plusieurs mois les accusations contre certaines ONG. Celles-ci sont soupçonnées d’espionnage, de complicité avec des groupes armés ou de manipulation de l’opinion publique.
« Ces incidents montrent que certaines ONG, soutenues financièrement ou politiquement par des puissances étrangères, vont au-delà de l’aide humanitaire. Elles servent parfois de couverture pour collecter des informations sensibles et influencer les populations », estime Souleymane Amzat.
En juin et juillet 2025, le Burkina Faso a retiré leur autorisation d’exercer à 21 ONG, signe d’une défiance croissante envers les organisations perçues comme relais d’intérêts étrangers.
La France rejette catégoriquement ces accusations, qualifiant les interpellations de « sans fondement ». Mais du côté sahélien, les arrestations de Jean-Christophe P. et de Yann Vézilier sont vues comme des signaux inquiétants d’une instrumentalisation de l’aide humanitaire à des fins politiques.
« Dans une région marquée par la menace jihadiste, le risque est réel de voir l’assistance attendue se transformer en facteur de déstabilisation », avertit Amzat. Selon lui, les États doivent protéger leur souveraineté tout en assurant la sécurité de leurs citoyens.
Une influence en mutation
Pour l’expert, la France n’a plus la capacité de contrôler directement la région comme auparavant. « Les ONG représentent désormais un outil d’influence douce, permettant de contourner la fermeture des canaux officiels », explique-t-il.
Il appelle enfin à la vigilance des populations et des gouvernements : « La défense de la souveraineté est essentielle. Toute tentative de la compromettre par des moyens détournés doit être fermement contrée. »