Un projet d’ampleur est en préparation aux États-Unis. D’après une enquête du média américain Politico, l’administration Trump envisagerait de transférer jusqu’à 9 000 migrants au centre de détention de Guantanamo, avec pour objectif final d’accueillir jusqu’à 30 000 personnes. Cette initiative, qui n’a pas encore été officiellement confirmée par la Maison Blanche, suscite déjà de vives préoccupations, notamment sur le plan du droit international.
Guantanamo, connue pour avoir abrité des combattants dits illégaux après les attentats du 11 septembre 2001, pourrait désormais servir de lieu de détention pour des migrants identifiés comme en situation irrégulière sur le sol américain. Si des transferts à petite échelle avaient déjà été amorcés, le projet actuel marquerait un changement de dimension.
Selon les informations publiées, les migrants seraient détenus temporairement sur la base avant d’être expulsés vers leurs pays d’origine. L’objectif, à moyen terme, serait de porter la capacité d’accueil du camp à 30 000 personnes, ce qui nécessiterait d’importants travaux de réaménagement.
Ce qui surprend dans ce projet, c’est l’origine des personnes concernées. En plus des ressortissants d’Amérique latine et des Caraïbes (notamment des Haïtiens, Vénézuéliens et Nicaraguayens), on parle également de nombreux Africains (Somaliens, Soudanais, Érythréens) et, fait inédit, de citoyens européens. Des migrants venus du Royaume-Uni, de France, d’Italie, de Belgique, des Pays-Bas, d’Allemagne, de Lituanie, de Pologne ou encore d’Ukraine figureraient sur les listes.
À ce stade, aucune communication officielle n’a été faite par les pays concernés, et il est même évoqué que certaines capitales – dont Paris – n’auraient pas été informées, ce qui poserait un problème de conformité avec la Convention de Genève et les standards internationaux en matière de traitement des personnes.
Guantanamo, un site sous tension
La base navale américaine de Guantanamo, située sur l’île de Cuba, reste l’un des symboles les plus controversés de la politique sécuritaire américaine. Louée depuis plus d’un siècle, elle abrite toujours des infrastructures militaires actives, bien que le nombre de militaires sur place ait considérablement diminué depuis la guerre froide.
La prison, construite en 2001 sous George W. Bush, a accueilli jusqu’à 780 détenus, accusés de terrorisme ou d’activités illégales liées aux conflits au Moyen-Orient. Aujourd’hui, ils ne sont plus qu’une quinzaine, dont certains inculpés pour les attentats du 11 septembre, comme Khalid Sheikh Mohammed.
Le centre reste cependant extrêmement coûteuxpour l’oncle Sam. Selon The New York Times, le coût annuel s’élevait à 540 millions de dollars en 2019, soit environ 13 millions de dollars par détenu. Une réalité budgétaire qui rend toute extension problématique sur le plan financier.
Outre les enjeux juridiques et logistiques, Guantanamo reste associé dans l’opinion publique aux images des détenus en combinaison orange, menottés, les yeux bandés – une symbolique forte et controversée. La prison est également soupçonnée d’avoir été le théâtre de pratiques de torture, ce que l’armée américaine n’a jamais officiellement reconnu. Barack Obama avait tenté de fermer ce site pendant ses deux mandats, sans succès.