Alors que le débat sur la tenue des élections générales de 2026 au Bénin commence à gagner du terrain, l’ancien président de la Cour constitutionnelle, Théodore Holo, rejette catégoriquement toute idée de report du scrutin pour des raisons d’insécurité. Dans un entretien accordé au média Matin Libre, le constitutinnaliste estime qu’un tel report ne serait justifié que si l’insécurité était généralisée à l’ensemble du territoire national, ce qui n’est pas le cas selon lui.
Théodore Holo est catégorique. Au Bénin, il ne peut y avoir réport des élections pour cause d’insécutité. Il rappelle notamment que des pays confrontés à des crises sécuritaires plus sévères ont continué d’organiser des scrutins. Il cite en exemple le Mali, où le djihadisme sévit depuis plus de sept ans, et où l’argument sécuritaire ne peut être éternellement utilisé pour repousser des échéances démocratiques. « Si l’on doit attendre que la sécurité soit totalement rétablie, il n’y aura peut-être pas d’élections avant dix ans », avertit-il.
« Les élections générales ne peuvent pas être repoussées, puisque l’insécurité n’est pas totale. Elle concerne une zone déterminée », fait-il observer.
L’ancien président de la Cour constitutionnelle insiste sur le fait que les autorités doivent prendre leurs responsabilités pour garantir un cadre sécurisé permettant l’organisation du scrutin. « Même lorsque vous êtes au pouvoir, vous ne pouvez pas affirmer : “Il y a de l’insécurité, donc je vais rester en fonction.” Vous devez prendre des mesures pour créer les conditions de sécurité afin que les élections aient lieu à l’échéance prévue », affirme-t-il.
Il invite à relativiser la notion d’insécurité car, estimet-il, aucun pays n’y échappe totalement. « Quel pays n’en connaît pas ? Il y a des degrés d’insécurité », note-t-il, en prenant l’exemple de la France où les actes de violence et les attentats n’ont jamais empêché la tenue d’élections.
« Le Bénin ne doit pas céder à la peur »
Pour renforcer son propos, Théodore Holo cite plusieurs précédents historiques. Les États-Unis, en pleine Seconde Guerre mondiale, ont maintenu leurs processus démocratiques. Franklin D. Roosevelt a même été reconduit à la présidence pour un quatrième mandat en raison du contexte exceptionnel, avant que la Constitution américaine ne soit modifiée pour limiter les mandats à deux.
De même, la Grande-Bretagne, pourtant engagée dans le même conflit mondial, a organisé des élections durant la guerre. Pour lui, ces exemples prouvent que la tenue des élections dans un contexte de crise n’est ni inédite ni impossible.
En Afrique et plus proche du Bénin, le cas du Cameroun en 2018 est tout aussi parlant. Malgré les violences armées dans l’Extrême-Nord, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, le pays a organisé une élection présidentielle. Théodore Holo, alors en mission d’observation pour l’Union africaine, témoigne de la mobilisation des institutions et des acteurs politiques pour assurer le déroulement du scrutin. Il évoque notamment la situation du candidat Maurice Kamto, empêché de tenir un meeting à Douala mais qui n’a jamais contesté la tenue de l’élection elle-même.
C’est pourquoi Théodore Holo met en garde contre les tentations de justifier un éventuel report des élections par la situation sécuritaire. « Ce ne sera pas une raison suffisante. Et j’espère que le Bénin ne sera pas envahi par le vent de l’insécurité au point de ne pas pouvoir organiser ses élections », déclare-t-il.